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Sylvain

Aux petits garçons qui ne sont pas sages.

Il était une fois un petit garçon qui était très méchant.

Il s’appelait Sylvain.

Il était méchant envers tout le monde.

Il faisait de mauvais coup à son papa.

Une fois, il avait semé des clous devant le garage, et les pneus de la voiture avaient été crevés.

Une autre fois, il était monté sur le toit, et avait bouché la cheminée avec du foin.

Quand sa maman revenait des courses, il avait glissé un crapaud dans son panier.

Un jour où elle cherchait à faire un gâteau, et où elle ne trouvait plus le beurre, Sylvain l’avait donné aux oiseaux.

Une autre fois, il avait peint en vert le chat de la maison.

En classe, il était souvent puni.

A la maison, il avait reçu quelques gifles et des fessées.

Mais rien n’y faisait.

Dès le matin, quand il se levait, il lui venait déjà des idées à faire des farces, des mauvais coups.

Le soir, quand il se couchait, il n’aimait pas qu’on lui raconte de belles histoires, mais au contraire, des histoires tristes, peuplées de brigands et de monstres.

Et vous pouvez être sur, que la nuit, dans ses rêves, il préparait ses coups du lendemain.

Son Papa et sa Maman ne savaient plus quoi faire de ce garnement.

Un jour, toutefois, une idée leur vint.

Ils décidèrent de le placer dans une école de correction, une de ces écoles dans lesquelles on met les plus mauvais sujets.

Il s’y trouve des instituteurs terribles, qui sont parfois d’anciens garnements convertis.

Il y en a qui se promènent dans les couloirs en faisant voltiger une règle en métal, comme des majorettes leur bâton.

Et chaque élève savait qu’un coup de règle sur le bout des doigts, cela faisait très mal ...

Quand Sylvain arriva à cette école, il fut accueilli par le Directeur qui d’emblée lui tira les oreilles.

De colère, Sylvain lui donna un coup de pied dans les jambes.

Le Directeur devint alors tout rouge, et le prit par le col, pour le conduire au bout d’un interminable couloir jaune devant une porte.

Là, il frappa.

Une grosse voix lui répondit.

Sylvain fut poussé à l’intérieur de la classe.

Derrière le bureau en bois se tenait l’instituteur.

C’était un petit homme avec une grande barbe noire, au-dessus de laquelle deux yeux le regardaient fixement.

Mais Sylvain, qui avait du cran, alla devant le bureau et se croisa les bras.

L’instituteur lui demanda son nom.

Sylvain, par défi, resta silencieux.

Alors l’Instituteur s’approcha de lui, lui prit les pattes sous les oreilles, et tira. Sous la douleur, Sylvain souleva ses talons.

Mais le barbu tirait toujours.

La classe - une dizaine d’élèves - rigolait grassement, à ce spectacle qui ne devait pas être nouveau pour elle.

Vint un moment où Sylvain hurla de douleur.

L’instituteur le maintint ainsi quelques secondes, puis lâcha, et lui dit d’aller s’asseoir.

Sylvain obéit, en ruminant de sombres pensées.

Il songeait déjà à la revanche.

Les semaines se passèrent.

Sylvain fut répertorié de risque “ panthère noire ”, c’est-à-dire comme un élément particulièrement à mater.

Il faut dire que Sylvain n’était pas en reste, ici aussi, de coups pendables.

Il avait mis des boules puantes sous les pieds de la chaise du barbu, et quand celui-ci s’était assis, il avait fait éclater les boules ; tout le monde avait été obligé de sortir, tellement l’atmosphère était irrespirable.

Mais Sylvain sentait qu’autour de lui l’étau se resserrait.

Le directeur l’avait privé de desserts, bien des fois, et parfois même de repas du soir.

C’était ce qui l’affectait le plus.

L’instituteur le surveillait de très près, et lui avait confisqué la plupart de ses affaires, si bien que Sylvain n’avait guère de matériel pour faire des farces.

Le soir, dans le dortoir, le surveillant passait tout le monde en revue, et s’attardait particulièrement à Sylvain.

Un jour, Sylvain en eut assez.

Il résolut de s’échapper.

Mais où aller ? S’il revenait en ville, les gendarmes ou les policiers l’auraient vite attrapé.

Et s’il se promenait à travers champ, il finirait aussi par être repéré.

Alors, il n’y avait qu’une seule solution.

De l’autre côté du haut mur qui faisait le tour de l’école, il y avait une forêt.

Depuis quelques jours, Sylvain la regardait, à travers les barreaux de la fenêtre.

C’était pour lui une rangée de grands arbres, aussi hauts que les bâtiments, qui s’alignaient là, à quelques dizaines de mètres.

Ce qu’il y avait derrière, il n’en savait rien, et n’en voyait d’ailleurs rien.

Son esprit tordu ne lui laissait rien imaginer d’autre que ses mauvais coups.

Pour lui, la forêt, c’était des arbres, rien de plus, et d’ailleurs, à quoi ça sert les arbres ? Il faut dire, chose incroyable, qu’il n’était encore jamais rentré dans une forêt, ayant par contre passé un temps important devant la télévision ou les jeux vidéos.

Mais la forêt, pour lui, c’était la liberté, c’était échapper au directeur, à l’instituteur, aux surveillants et à tous les autres.

Une nuit, il alla dans le gymnase.

Là il détacha une corde à grimper.

Puis, il gagna le jardin de l’école.

Il avait observé le jardinier, et savait où celui-ci remisait l’échelle qui lui servait à monter aux arbres.

Il prit l’échelle qui était en aluminium léger.

Il l’adossa au mur d’enceinte, monta, attacha la corde au dernier barreau, la jeta de l’autre côté, grimpa sur le faîte du mur, puis se laissa descendre, de noeud en noeud.

La corde lui râpait l’intérieur des mains, mais il était trop à l’ivresse de l’évasion pour y accorder d’attention.

Quand il atterrit sur le sol, il poussa un petit cri de joie.

Ce qu’il remarqua alors en premier, c’est que l’odeur de l’air avait mystérieusement changé.

Ce n’était plus ces odeurs de peinture, de colle, de cuir ou d’encre et de feutres, mais une odeur étrange, nouvelle, indéfinissable, mais forte.

Ce devait être l’odeur de la forêt.

Il avança. L’herbe cédait le pas à la litière.

La lisière approchait.

Du côté du collège, tout était silencieux, tout le monde dormait, même les surveillants, dont on entendait encore les ronflements sonores à travers les fenêtres ouvertes.

Sylvain hésita un instant au moment d’entrer dans la forêt.

Dans la nuit, cette rangée d’arbres avait quelque chose d’impressionnant.

Et puis, comme il avait du cran, il y alla, Il se dit que de toute manière, il pourrait en ressortir quand il voudrait.

Là, il se trompait.

Il se dénicha un coin, à l’intérieur de la lisière, sous un grand épicéa.

Il s’enroula dans une couverture brune qu’il avait chipée à l’école, et s’endormit.

Pour une fois, ses songes ne furent plus hantés par les visages du directeur ou du barbu.

Etait-ce déjà un miracle que la forêt opérait ? Ne nous y trompons pas.

Il fut réveillé par un roitelet qui sautillait de curiosité autour de lui.

L’oiseau, hôte familier de ces lieux, s’étonnait de cette masse allongée sous l’épicéa, dont il venait picorer les graines.

Il alla même se percher sur la couverture et se mit à chercher quelque insecte dans l’épaisseur de celle-ci.

Ce sont ces picotements qui réveillèrent l’enfant.

Il ouvrit les yeux tout étonné de se voir là, puis se souvint.

Il se sentit alors heureux et fier. Il se mit debout, et secoua sa chevelure bouclée couverte de rosée.

Il ressentit un grondement dans son ventre, il avait faim. Que manger ? Il n’y avait autour de lui que des feuilles et des branches.

Il commença à regretter le bol de lait et le beurre de l’école, mais de dépit, refusa de reconnaître sa faim.

Il entendit alors des cris du côté de l’école.

On s’était aperçu qu’il avait fuit, et l’on avait repéré l’échelle.

C’était la voix du directeur.

Sylvain ramassa à la hâte sa couverture, et s’enfonça dans la forêt.

Il avait ramassé un bâton, et s’amusait à taper un peu partout.

Il s’acharnait sur les ronces, les fougères, les troncs.

Il cassait des branches.

Son chemin était ainsi parsemé de mille débris.

Au passage, il ramassa des mures en quantité, et calma sa faim.

Il trouva un chemin, encadré par de hauts chênes, et l’emprunta.

Le soleil s’y déversait en flots de lumière.

Les feuilles paraissaient vernissées, et les cailloux du chemin luisaient comme des pierres précieuses.

Sylvain marchait mollement, n’ayant aucun but particulier.

Il suivait toutefois le vol des papillons, et s’amusait à leur donner de grands coups de bâton qui ne les touchaient guère.

Un hérisson traversa le chemin.

Sylvain se précipita, et lui jeta un caillou.

L’animal se mit en boule.

Le garnement lui donna plusieurs coups de bâton, si bien que le hérisson se déroula, et regagna l’herbe du talus, en geignant. Sylvain riait aux éclats, à pleines dents, d’un rire franc et carnassier.

Sylvain déambula ainsi toute la journée.

La forêt n’en finissait pas, mais Sylvain n’en avait cure ; il était à son obsession.

Il était libre, ne subissant aucune autorité, aucune contrainte.

Il eut la bonne fortune de trouver un néflier avec ses fruits, de l’an passé, trop mûrs, mais il s’en nourrit.

Le deuxième soir tomba alors qu’il avait bien avancé au cœur de la forêt, à l’intérieur d’une sapinière qui bruissait d’oiseaux, de mésanges à longue queue.

Sylvain y passa la nuit avec le couvert dense des branches de sapins au-dessus de sa tête.

Avant de s’endormir, il lui revint bien en mémoire quelques contes que son père lui racontait à la maison, et dans lesquels il était question de loups et de bêtes féroces dans les forêts.

Mais son esprit fort lui dit que tout cela était des inventions.

Il se roula dans sa couverture et s’endormit content.

Cette nuit là, il y eut beaucoup de chuchotements dans la forêt.

En fait, si Sylvain avait été plus attentif au cours de la journée, il aurait perçu le frissonnement des feuillages autour de lui, alors qu’aucun vent ne soufflait.

Il aurait vu que les ancolies bleues balançaient leurs corolles à son passage, que les fougères royales se refermaient après lui, comme pour masquer sa trace.

Et cette nuit, l’information circulait.

Il y avait un petit garçon dans la forêt.

Il s’était attaqué à une centaine d’arbres, leur tapant sur l’écorce, qui était fragile, cassant leurs branches basses ...

Les bouleaux blancs en particulier en avaient long à dire, sans compter les noisetiers, les genévriers ...

Les papillons, eux, dormaient, mais on savait qu’ils avaient été embêtés.

Quant au hérisson il s’était plaint amèrement.

Ah ! oui, l’information circulait, et l’On écoutait très attentivement.

Car il faut vous dire que cette forêt, comme tant d’autres, était un peu magique.

Quand Sylvain s’éveilla le lendemain, il pleuvinait.

Sous les sapins, l’enfant était à l’abri. Il resta là, assis, les jambes repliées devant lui, et la tête sur ses genoux, à contempler le paysage drapé dans la pluie.

Le chemin, à quelques mètres de lui, en bord de sapinière, s’était orné de mille petites mers intérieures, que l’eau du ciel frappait en clapotant.

On aurait dit un long chapelet qui s’égrenait.

Les graminées couvertes de gouttes s’inclinaient.

Les papillons avaient replié leurs ailes à l’abri des feuilles, attendant sagement la fin de l’ondée.

Les oiseaux s’étaient tus.

Quand la pluie cessa, Sylvain se leva.

Une forte odeur monta.

Le parfum de la forêt mouillée se répandait, fait de mille subtilités.

Sylvain respira à pleins poumons, comme on lui avait appris à l’école.

Puis il emprunta le chemin à cloche-pied, en sautant par-dessus les flaques, jouant un peu à la marelle.

Il sifflotait.

Il sautillait ainsi quand il entendit un petit sifflement.

Il tourna la tête, et se dirigea vers le buisson de chèvrefeuille d’où venait ce son.

A son approche, un petit oiseau s’envola. En fouinant à l’aide de son bâton, il découvrit un nid.

Il y avait cinq œufs blancs avec des tâches bleutées.

Il en prit un, le regarda de près, puis s’amusa à le lancer le plus loin possible sur le chemin, comme un caillou.

L’œuf alla s’écraser un peu plus loin, répandant une bouillie jaune sur la poussière.

Sylvain fit de même avec un autre œuf, le jetant encore plus loin.

Le troisième et le quatrième allèrent se perdre dans les bas-côtés.

Le cinquième fut un record.

Satisfait de son lancer, Sylvain reprit le chemin, qui était maintenant encadré par de hautes broussailles, couvertes de liserons et de chèvrefeuilles odorants.

Il continuait à siffloter.

Tout à coup, il trébucha, et s’étala dans une flaque d’eau. Il avait le visage couvert de boue, et s’essuya avec une feuille de bardane.

Un peu plus loin, il s’apprêtait à sauter par-dessus une flaque, quand il trébucha à nouveau.

Ce coup-ci, il dit des gros mots qu’il avait entendus à l’école.

En se relevant, il était étonné d’avoir trébuché à nouveau et observa le revêtement du chemin.

Il n’y avait pas de pierre saillante.

Il avait donc dû glisser.

De colère, il donna de grands coups de bâton dans la flaque d’eau, qui se vengea en l’aspergeant.

La forêt tout autour était mystérieusement attentive.

Un certain sourire planait.

Le chemin longeait maintenant une sorte de marre qui venait de se remplir abondamment.

D’entre les roseaux et les massettes montaient des coassements.

Sylvain s’approcha.

Une jolie grenouille verte irisée était accroupie immobile sur une feuille.

L’enfant commença à ajuster son coup.

Il était sur le point de frapper, quand il reçut sur le dos et sur les fesses une sorte de gifle qui manqua le faire tomber à l’eau.

Surpris, il se retourna.

Il n’y avait personne sur le chemin, ni à droite, ni à gauche.

A la surprise succéda un sentiment presque nouveau, qui lui tordait l’estomac.

Pour une fois, Sylvain sentit la peur.

Il se rendit soudainement compte de sa solitude ; il était seul au milieu de cette forêt.

Il se mit à courir sur le chemin, puis rentra dans une parcelle de hêtres.

Il courait entre les troncs, le plus vite possible que lui permettait ses petites jambes.

Il trébuchait souvent et tombait, se relevait et reprenait sa course.

Les branches du sous-bois le giflaient au passage, et certaines accrochaient ses vêtements.

Il arriva dans une clairière où quelques anémones sylvestres fleurissaient.

Là, il s’adossa au tronc gris clair d’un hêtre et souffla.

Où était la figure familière du directeur, du barbu, et de son papa ou de sa maman ? Il avait comme un regret.

C’est alors qu’il entendit un pas.

Quelqu’un marchait dans la hêtraie, pas loin, et se dirigeait vers lui.

C’était un pas pesant.

Sylvain serra fort son bâton.

Et puis, d’entre les branches basses, un étrange personnage surgit.

C’était une femme.

Elle était vieille et laide.

Elle était grosse, et même obèse.

Ses longs cheveux tombaient presque jusqu\'à terre.

Elle avait un long nez rouge avec un bourgeon au bout, violet comme celui des mélèzes.

Mais ce qui étonna le plus Sylvain, c’était ses deux yeux qui rougeoyaient comme des braises.

La créature se mit à parler :

- ah te voilà, mauvais drôle !

Sylvain se serra contre le tronc. L’autre reprit :

- tu sais que tu ne me plais pas beaucoup !

- moi non plus ! lança l’enfant ;

- Petit insolent ! Et là les yeux de braise rougeoyaient.

Je vais t’apprendre moi à respecter la forêt, à ne pas taper sur les animaux, ni à enlever les écorces des arbres ! Sais-tu que tu leur fais mal ?

Il faut vous dire qu’il s’agissait là de Dame Kacinka, une sorte de bonne sorcière, malgré les apparences, qui était un peu l’esprit de la forêt.

En tous cas, elle détestait qu’on lui fasse du mal.

Elle détestait les poseurs de pièges, et souvent elle déjouait leurs traîtrises en glissant un bâton entre les terribles mâchoires.

Elle n’aimait pas non plus les voleurs, surtout les voleurs de bois.

On racontait qu’elle en avait poursuivi plus d’un ; car en dépit de son volume, elle courrait vite entre les arbres.

Et alors, là, elle était vraiment méchante ; elle possédait une petite serpe d’or, avec laquelle elle entaillait les talons de ceux qu’elle poursuivait.

Pour les enfants, elle était plus indulgente, se contentant de leur tendre des bâtons invisibles entre les jambes, pour les faire tomber.

Ou parfois de leur administrer une volée de bâton vert.

Tout cela, Sylvain ne le savait pas.

Ce qu’il savait par contre, c’est qu’il détestait cette bonne femme.

Alors, encore mû par une de ses détestables idées, il brandit son bâton d’un air menaçant.

La vieille fit clignoter le bourgeon de son nez, le bâton se transforma en un rayon de lumière, qui s’égraina en poussières sur le sol.

Sylvain resta stupéfait.

Il n’avait jamais vu ça.

Il commença à penser que toutes les histoires de son papa, ce n’était pas que de l’imagination.

Alors, la peur lui donna des ailes.

Il contourna le tronc du hêtre, et se mit à courir droit devant lui, à travers les troncs.

La vieille se lança à sa poursuite, et lui lança :

- tu peux courir va !

Tu ne sortiras pas de la forêt !

Elle fit à nouveau clignoter le bourgeon de son nez rouge.

Sylvain courrait, quand tout à coup les branches devant lui l’empêchèrent de passer.

Il essaya de passer à droite, puis à gauche, mais rencontra d’autres branches.

Derrière lui, la grosse dame arrivait.

Elle éclata de rire.

Et dit :

- ah, ah, te voilà prisonnier !

Puis après un petit instant :

- me promets-tu d’être désormais gentil ?

Sylvain ne répondit pas, et se mit à bouder.

- Très bien - reprit l’autre - tu resteras ainsi, aussi longtemps que tu ne m’auras pas dit oui ! Je dois m’en aller, mais si tu veux m’appeler, tu n’as qu’à crier.

Et sur ce, la Dame disparut.

Sylvain se retrouva seul.

Il resta là deux jours et deux nuits.

Il avait de plus en plus faim ; le jeune porte toujours conseil ; il commençait à se demander s’il avait raison.

Le troisième jour, quand les rayons accrochèrent les écailles des troncs rouges des pins sylvestres, Sylvain s’aperçut qu’il pouvait se faire un trou dans cette espèce de cage qui le retenait prisonnier.

Il s’y faufila et sortit.

Il retrouva un chemin, et finit par déboucher sur celui qui l’avait conduit à l’intérieur de la forêt.

Il était près de la lisière.

Pourtant, il avait beau avancer, regarder, scruter, marcher, courir, sauter, il ne voyait jamais celle-ci.

Ce n’était que des arbres, derrière des arbres, et encore des arbres, un peu comme des barreaux dans une prison.

Une forêt sans bordure, sans limite, sans fin.

Un long couloir infini, sans ciel, sans échappée.

Il erra encore deux jours. Enfin, n’en pouvant plus, au détour d’un gros chêne, il tomba à genoux sur un gros matelas de feuilles mortes.

La lumière tombait à cet endroit en gros flocons multicolores qui jouaient sur le sol à la manière des vitraux.

Un silence absolu régnait.

Même l’écureuil roux s’était arrêté dans sa course.

Là, l’enfant pleura.

Pour une fois, il ne pleurait pas de rage.

Les larmes qui mouillaient la litière étaient des larmes de désespoir, et même de conscience.

Plusieurs noisetiers autour de lui s’étaient légèrement inclinés, comme pour faire une voûte gothique tapissée de leurs larges feuilles vert pale.

Il s’opérait dans cette chapelle forestière une sorte de Rédemption.

Quand Sylvain eut beaucoup pleuré, il cria, il appela la Dame.

Celle-ci arriva.

Elle vit les feuilles abondamment mouillées, elle vit les pleurs de l’enfant, elle vit son nouveau visage.

Elle sourit, et murmura d’une voix douce :

- alors, tu me promets ?

Et l’enfant répondit, en hochant la tête, et en tournant de grands yeux, tristes et fatigués, vers la Dame :

- oui, Madame, c’est promis !

Alors, Dame Kacinka eut un mouvement de nez, qu’elle avait fort rouge et long, et dit :

- tu peux y aller, maintenant.

Alors, chose incroyable pour qui avait connu Sylvain, l’enfant se précipita vers la Dame pour l’embrasser.

Mais il ne rencontra que de fines branches tombantes couvertes d’une mousse légère et inconnue.

Dame Kacinka était redevenue forêt.

L’enfant se mit à courir, courir, aussi vite que la biche.

Sa course était heureuse.

Les troncs s’étaient espacés.

La forêt s’était éclairée.

Il n’était pas jusqu’aux pervenches sur le sol qui écartaient leurs lianes entremêlées pour éviter à l’enfant de tomber.

Il retrouva la lisière, qui était tout proche.

Il se présenta à la porte de l’école, et se suspendit à la sonnette.

Quand on lui ouvrit, ce fut la stupéfaction, puis, la joie.

L’enfant avait disparu depuis si longtemps, qu’on redoutait le pire.

Le Directeur vint au galop.

Incroyable, il souleva l’enfant dans ses bras et l’embrassa.

Tous les enfants, surpris eux aussi, étaient dans la cour et applaudissaient.

Dans les semaines qui suivirent, le Barbu vint rapporter au directeur que Sylvain avait tellement changé de comportement qu’il n’avait plus besoin de rester dans sa classe.

Le Directeur, avant de prendre cette grave décision, tint lui-même à vérifier le carnet de notes et de conduite.

Celui des notes n’était pas excellent, mais il n’y avait aucune faute de conduite, et même au contraire des félicitations ; à un tel point d’ailleurs qu’elles commençaient à soulever des jalousies dans la classe.

Alors le Directeur fit venir les parents.

Ceux-ci ne reconnaissaient plus leur fils, tant il avait inexplicablement changé.

Ils mirent ce changement sur le crédit de l’établissement, et félicitèrent le Directeur, et l’Instituteur qui en furent fort satisfaits.

Depuis ce jour, Sylvain est revenu dans sa famille et son école normale.

Il a bien eu une petite rechute, mais de courte durée.

L’inspecteur d’Académie, qui passait, a tenu à le voir, et l’a cité devant toute la classe comme modèle.

On ne peut que se réjouir d’une pareille évolution.

Par ailleurs, quand vous allez en forêt, respectez là.

Amusez-vous du bois mort si vous voulez.

Mais respectez ce qui est vivant : laissez les arbres tranquilles.

Et si un petit démon vous pénètre subitement l’esprit, s’il vous prend l’envie de taper sur un hérisson qui trottine sur le chemin, d’abattre un papillon qui volette, d’écraser un escargot ou même une simple fourmi, méfiez-vous, Dame Kacinka n’est jamais bien loin, et son service de renseignement ferait pâlir d’envie le Président de la République lui-même.

Lequel aime aussi se promener en forêt ; mais il s’agit là d’une autre histoire ...


9 juillet 2001, Acca, accident de chasse, Affouage, Arbre, Association syndicale, Avocat environnement, Bandite, bois, Bois communaux, Boisement, Bourdaine, Champignon, chasse, Chasse en forêt, Chemin d’exploitation, Chemin rural, Chêne truffier, Chute d’arbre, Chute de branches, Code forestier, Coupe abusive, Coupe extraordinaire, CRPF, Débardage, Débroussaillage, Débroussaillement, défrichement, dégâts de gibier, Droit de chasse, droit forestier, eaux et forêts, Engref, Entrepreneur forestier, espace boisé, Expert forestier, Expertise agricole, Exploitation forestière, Forestier, forêt communale, Forêt de protection, Forêts, glycines, Groupement forestier, incendie forestier, Inventaire forestier, L. 130-1, Mayotte, Monichon, Morts-bois, Parc forestier, peupleraie, peuplier, Plan de zone sensible, Plan simple de gestion, Poésie, Processionnaire, régime forestier, Sérot, Soumission au régime forestier, Vent violent, Voirie départementale.