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Tu me consoleras, ami, du mal humain,
Quand, pour avoir rêvé de voir, sur mon chemin,
Les jeunes gens pensifs et les femmes rêveuses,
Pour avoir espéré de mêler aux yeuses
Les palmes aux doux bruits et les lauriers amers,
Pour avoir mesuré l'immensité des mers
Et reflété le ciel entier dans mes prunelles,
Moi, le multiple amant des grâces éternelles,
J'aurai flétri ma grâce au feu de mon orgueil.
Alors, je reviendrai vers ta maison en deuil.
Le midi lourd battra d'un rayon d'or la treille;
Un milan tournera dans le ciel; une abeille
Fuira vers les genêts, les ajoncs et le thym.
J'aurai connu l'oubli de l'homme et ses dédains,
Je saurai que l'enfant fut imprudent de croire
Ceux qui lui souriaient en lui parlant de gloire ;
Mais parce qu'une voix divine m'appela,
Je resterai poète, oubliant tout cela.
Alors qu'il sera beau, sur ma détresse amère,
Le sourire éternel de la lande, ma mère.
Elle qui mit son ambre en larmes dans mes yeux,
Elle qui m'enseigna ses chants harmonieux,
Elle m'accueillera gravement, en silence.
Je viendrai me coucher près du mur qui balance
Sa vigne-vierge rouge et ses fleurs sur le puits;
Au loin, j'écouterai chanter les pins. Et puis,
Si l'éclat du ciel blanc, sur le jardin en flammes,
Sollicite l'ardeur nouvelle de mon âme
A réveiller l'écho des rythmes enchantés,
J'ouvrirai grand mon cœur et je ferai chanter,
Parmi l'ascension des terrestres poussières,
Aux rayons du soleil, mon âme de lumière. |